"Sur le vif"
Au royaume de l’IA, les génies sont rois !
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« Avec le talent, on fait ce qu’on veut. Avec le génie, on fait ce qu’on peut ».
Cette phrase est attribuée à Jean-Auguste Ingres, peintre et dessinateur français né à la fin du 18e siècle.
Portraitiste au style affirmé, sa peinture s’éloigne des références académiques de l’époque pour révéler des toiles qui ont inspiré les plus grands artistes qui lui ont succédé : Henri Matisse, Pablo Picasso ou Auguste Renoir… Il était un créateur.
Mais quel rapport avec l’intelligence artificielle ?
C’est justement ce qu’a expliqué Hugues Dufour* lors d’une conférence** donnée à la Bfm vendredi 26 janvier et intitulée Créer à l’heure de l’intelligence artificielle.
Car aujourd’hui, dans l’approche de l’art, la donne a changé.
Désormais grâce l’IA, le génie suffit à faire ce que l’on veut, du moins sur une création numérique, puisque le talent est à la portée de tous. L’idée géniale est donc suffisante pour créer des œuvres et s’émerveiller.
Prenez-les pour preuve :
- lors de la Colorado State Fair, l’œuvre de Jason Allen, un concepteur de jeux vidéo de 39 ans, a remporté le prix de la plus belle œuvre d’art numérique. Son tableau, intitulé Théâtre d’opéra spatial, est le fruit d’un système exploitation numérique intitulé Mid Journey, donc de l’intelligence artificielle.
- Rie Kudan, romancière japonaise de 33 ans, a avoué avoir écrit son roman avec l’aide de l'intelligence artificielle générative comme Chat GPT. Elle a portant remporté le prix Akutagawa le 17 janvier à Tokyo, l’équivalent du prix Goncourt ! L’IA lui permettrait de libérer sa créativité.
- Autre exemple récent : c’est un portrait en noir et blanc représentant deux femmes qui a été primé par le jury du Sony World Photography Awards (SWPA), un concours international de photos amateurs.
Là encore, l’œuvre a été créée grâce à l’intelligence artificielle. - Et qui dire des Beatles qui viennent de sortir une nouvelle chanson, réunissant les voix de John Lennon et Paul McCartney.
Et l’art dans tout ça ?
Même si l’on sait aujourd’hui que l’intelligence artificielle est capable d‘apprendre comme les enfants à l’école (machine Learning), de reconnaître ce qui apparait sur une image, de répondre à des requêtes avec Chat GPT, les voitures autonomes ou certains robots, elle ne peut en aucun cas créer sans image ni vidéo.
C’est à ce stade qu’il faut clairement distinguer le talent du génie. Le talent, dans le sens de savoir-faire, est un domaine qui est donc accessible à l’IA. Tout comme la créativité qui se place à la portée de tous grâce à elle. On réinvente quelque chose à partir de ce qui existe. Et comme le précise Hugues Dufour, « L’IA peut permettre de démocratiser l’art en rendant la création accessible à tous, simplement parce qu’il n’y a pas de vérité en art (Pablo Picasso) ».
En matière de création pure, c’est une autre paire de manches car les nouvelles connaissances ne reposent pas sur l’existant. Elles se créent au jour le jour à partir d’un cheminement intellectuel.
C’est pour cela que les repères et l’éducation ont toutes leur importance pour comprendre ce que nous livre l’IA. C’est un combat à mener face aux fake news et la capacité qu’à l’homme à douter.
En revanche, l’IA en tant que source d’inspiration est de plus en plus utilisée dans les métiers de la créativité par exemple. Mais là encore, entre les mots qui sont saisis pour parvenir à obtenir un contenu et la démarche créative qui émane de l’inconscient, le fossé est large.
* Hugues Dufour est Game designer, essayiste, musicien. Il a écrit plusieurs ouvrages et composé un cycle musical avec des algorithmes. En cours de finalisation, son œuvre a vocation à être jouée par des musiciens devant un public.
- L'art face à l'IA : vers un imaginaire augmenté - Éditeur(s): Fyp éditions
- La civilisation virtuelle : nouvel horizon du jeu vidéo - Éditeur(s): Fyp éditions
- Le langage intégral : théorie esthétique des nouvelles technologies - Éditeur(s): L'Harmattan
**Chaque mois, la Bfm organise des rendez-vous numériques.
Toute la programmation dans l’agenda sur le site : https://bfm.limoges.fr/
Dans tous les cas, le recours à l’IA émane d’une requête qui génère un contenu. Mais elle n’est pas en mesure de raisonner, ni de créer des concepts qui relèvent du raisonnement humain. La formule E = mc2 est née du raisonnement d’Albert Einstein.
L’être humain raisonne selon les sens des mots et leur définition. La machine crée des phrases selon la suite la plus probable des réponses qu’elle trouve sur Internet et génère une sélection aléatoire de la réponse. C’est pour cela qu’à la même question, plusieurs réponses seront données par la machine.
En revanche, l’intelligence artificielle apprend et peut en un temps record glaner toutes les informations qui se trouvent sur la toile.
Ainsi, comma l’a précisé Hugues Dufour, il ne faut pas éprouver une peur panique face à l’IA car ce qui définit l’Homme est justement sa capacité à faire preuve de discernement qui repose sur le trio que forment l’éthique, la vigilance et l’éducation.
En revanche, à l’instar de la révolution industrielle, de l’apparition des machines et de la mécanisation, l’Intelligence artificielle pourra réaliser certaines tâches, dites « intellectuelles », dès lors qu’elles sont techniques, spécialisées et répétitives.
Mais ces avancées resteront toujours des outils au service de l’Homme.